Les photographies de Carline Bourdelas sont à découvrir au château Mourgues du Grès

Balzac nous plonge dans le monde de la peinture au XVIIe siècle, aux côtés de trois artistes : le jeune Poussin, le peintre Porbus et surtout Frenhofer, un vieux maître obsédé par la perfection.
Depuis dix ans, Frenhofer travaille en secret sur un tableau qu’il considère comme son chef-d’œuvre, une œuvre vivante, parfaite… Mais lorsqu’il la dévoile enfin, ses amis ne voient qu’un chaos de formes, à peine une jambe identifiable. Frenhofer, fou de douleur, comprend qu’il s’est trompé, qu’il est seul à voir la beauté. Il brûle ses toiles et se suicide.
À travers cette histoire, Balzac interroge ce qu’est la création artistique, le regard, et la folie du génie. Peut-on tout comprendre de l’art ? La beauté est-elle dans l’œuvre, ou dans l’œil de celui qui la contemple ?

En quelques pages, Balzac nous propose une profonde réflexion sur l’absolu en art, le danger du perfectionnisme, et la solitude du créateur. C’est une œuvre courte mais vertigineuse, qui nous parle encore aujourd’hui.”
Carline Bourdelas réalise une série pour la Rotonde Balzac sur la folie et le génie de l’artiste en s’inspirant du Chef d’œuvre inconnu.
Ce qui attire Carline Bourdelas dans ce texte, pourtant terriblement conventionnel, c’est le thème de l’œuvre invisible. Elle n’existe et n’est parfaite que dans l’imagination du peintre. L’Art avec une majuscule est un absolu. Mais il se confond dans l’imaginaire de l’artiste avec une femme dont on ne sait si elle est rêvée ou bien réelle. Cette femme, Carline Bourdelas l’a-t-elle rencontrée ? Apparition fugace elle émerge d’un monde singulier ou les plans se mêlent ou jaillissent parfois des détails réalistes. Et de ce chaos émerge cette sublime créature à l’incroyable chevelure rousse.

Carline Bourdelas à Deauville
Cette fascination pour la figure féminine est cependant inséparable de l’atelier dans lequel elle apparait ; le héros de Balzac insiste sur « le charme de ce lieu où se révèlent quelques-uns des procédés matériels de l’art » où le fatras des outils de la création ne laissent subsister qu’un étroit chemin symbole de la complexité d’un monde où la figure de l’idéal reste empêtrée dans la réalité matérielle de l’atelier. Réalité permanente de l’atelier ou travaille l’artiste que l’on retrouve un siècle et demi plus tard dans l’espace encombré de l’atelier de Ronan Barrot que Carline Bourdelas a photographié.
On est loin aujourd’hui de la cuisine de cette peinture « pleine de demi-teintes et de glacis » de cette « pate souple et nourrie » des peintres de la renaissance italienne que décrit Balzac.
C’est de cette tambouille du peintre pourtant ignorée et condamnée aujourd’hui, qu’émerge la figure lumineuse de la « femme apparence » découpée dans le réel, issue elle aussi de multiples manipulations de la technique photographique, elle montre bien que le travail de l’atelier reste toujours au cœur de la création.
Texte de l'artiste