Les techniques d'Angèle Guerre, à découvrir au domaine de Poulvarel
L’outil est au cœur de ma pratique. Diplômée en 2013 des Beaux-Arts de Paris, j’ai ensuite été formée à la reliure, à la gravure. Je vis et travaille à Auvers sur Oise.
La plume, le scalpel, la calligraphie sont mes instruments de prédilection dans un rapport étroit à l’artisanat ainsi qu’à à l’écriture. Je développe une pratique du dessin au scalpel sur papier brut ou teinté de pastel. J’élabore également un travail d’installation in situ avec des éléments de papier et de cuir. Je maroufle les deux matières ensemble et les incise. La faune et la flore sont des éléments centraux dans mon travail. J’essaye, que ce soit avec des sculptures ou à travers le dessin, de reproduire des sensations. Mon rapport à la matière est très tactile, très direct. Pour moi, la surface (du papier, du cuir…) est une peau que l’on peut scarifier ou caresser.
Vidéo : © Galerie Jamault
Le cuir, qui est ainsi entré dans mon travail depuis plusieurs années, est l’incarnation de la sensualité animale, mais aussi de la domination de l’homme sur lui, de la violence exercée à son encontre. Les installations in situ Souples, un souffle reproduisent des gestes archaïques : dépecer la bête, la suspendre. A la fois douces et violentées, les formes sont autant soutenues que transpercées par des lignes métalliques.
La violence, dans mon travail, se marie ainsi avec la contemplation.
De mon enfance, je garde le souvenir que nous allions au tout petit matin observer les animaux. Il fallait se lever tôt pour découvrir ces petits animaux qui peuplaient alors la Provence. Ces très beaux moments de promenades sont principalement faits d’attente et de contemplation. Il faut parfois attendre des heures dans la rosée et la brume, à l’affût du moindre bruit, qu’un animal surgisse soudain pour s’enfuir aussitôt. « L’animal détient des secrets » dit John Berger dans Pourquoi regarder les animaux. Il y avait de la magie, une magie ancestrale, à observer les animaux sauvages dans la forêt. Je souhaite retrouver cette part d’enfance, refaire naître cet émerveillement en allant capter la nature, sa lenteur, ses habitants, ses micro-évènements.

Photographie : © Septieme Gallery
Je place au centre de mes recherches la notion d’Umwelt, qui permet de définir l’ensemble de l’espace perceptible à un être vivant. A chaque être vivant, son propre monde, abordé par les sens qui lui sont propres. Le vivant est un enchevêtrement de tous ces mondes.
Texte de l'artiste